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L’émigration des Basques et des Béarnais en Amérique aux 19e et 20e siècles.

“La Touraine” Cie. Gle. Transatlantique. [Entre 1890 et 1923] [Photographie] Disponible sur le site de la Library of Congress : https://www.loc.gov/item/2013645888/.

Si l’émigration des Basques dès le 19e siècle est bien connue, les Béarnais émigrent eux aussi massivement vers l’Amérique, de sorte qu’il n’est pas rare, lorsqu’on travaille sur la généalogie d’une personne originaire des Pyrénées-Atlantiques, de tomber sur des candidats à l’émigration. 

Pourquoi cet engouement ? Quelles étaient les destinations de predilection de ces voyageurs ?

Un peuple mobile

De par leur situation frontalière, les Pyrénées-Atlantiques ont toujours connu une tradition migratoire importante. 

Le commerce avec l’Espagne a favorisé, dès le XVIIe siècle, le déplacement des hommes de part et d’autre de la frontière. Ainsi de nombreux Basques et Béarnais sont partis pour l’Espagne et de là, parfois même vers les colonies espagnoles sur le continent américain.

A partir du début du XIXe siècle, le département des Pyrénées-Atlantiques est l’un des département français à connaître une forte émigration à destination de l’Amérique.

Un total de 75000 à 80000 Basques et Béarnais aurait émigré entre 1832 et 1884. Parmi eux, ⅔, soit au moins 50000, sont Basques.

Cette émigration s’accélère dès la fin du siècle pour s’élever à environ 100000 départs entre 1884 et 1907.

L’émigration des Basques est bien connue sous le nom de diaspora Basque. Cependant, même si elle s’est faite dans une moindre mesure, l’émigration des Béarnais a également été importante. 

Le premier port de départ est celui de Bayonne, peu à peu délaissé au profit du port de Bordeaux, puis du Havre.

Emigrants dans un hangar du port du Havre. [1890-1910] [photographie] Disponible sur Gallica : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10480215n

Pourquoi partir ?

Le département des Pyrénées-Atlantique est un département essentiellement rural et agricole.

Son histoire, marquée par une forte indépendance jusqu’à la Révolution française, en fait une zone particulièrement attachée à ses coutumes. Une des coutumes locales encore en vogue au XIXe siècle est celle de la primogéniture. C’est à dire que le premier enfant né (garçon ou fille) est l’héritier de tout le patrimoine de ses parents. Cet enfant hérite de la maison ainsi que des terres familiales obligeant ses jeunes frères et sœurs, soit à épouser l’aîné(e) d’une autre famille, soit à travailler pour eux.

Cette coutume, lorsqu’elle est suivie par la famille, pousse de nombreux cadets à chercher fortune ailleurs. L’émigration est alors une option intéressante.

Une autre raison qui apparaît peut être le refus du service militaire. Les départs s’accentuent notamment au moment de la guerre de Crimée dans les années 1853 à 1855.

Affiche imprimée, vers 1875. Source : Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques (3U4/1745)

Destination Amérique

L’Amérique du Sud

La première destination privilégiée est l’Amérique du Sud où les anciennes colonies achèvent leur indépendance dans le premier quart du XIXe siècle (en 1816 pour la région du Rio de la Plata en Argentine, 1818 pour le Chili et 1828 pour l’Uruguay.) 

L’Uruguay et l’Argentine sont des pays en plein développement avec une économie à forte demande de main d’œuvre qui en font des pays très attractifs pour les candidats à l’émigration. 

La zone de prédilection des français devient rapidement la région du Rio de la Plata qui englobe Buenos Aires en Argentine et Montevideo en Uruguay.

Immigrants européens arrivant en Argentine, 19e siècle. Source : Wikipedia

L’Amérique du Nord

Dès 1848, la Californie, récemment conquise sur les mexicains, devient une nouvelle destination de prédilection.

La découverte de riches dépôts d’or dans les montagnes à l’est de Sacramento marque le début de la ruée vers l’or. 

La nouvelle se répand rapidement à travers le monde entier. En France, cette annonce suscite beaucoup d’intérêt car elle coïncide avec une triple crise économique, sociale et politique.

Basques et Béarnais se joignent à d’autres français pour entamer un long voyage jusqu’à San Francisco. 

Cet engouement pour la Californie s’accélère dès les années 1870-1880 grâce au progrès des moyens de transports qui rendent le voyage plus rapide et plus confortable. Les Basques et les Béarnais s’installent principalement à San Francisco où les Béarnais excellent dans l’industrie de la blanchisserie, mais aussi dans les comtés de Kern (Bakersfield) et de Lassen au Nord Est de l’état, près de la frontière avec le Nevada, où ils sont rancheros, éleveurs ou viticulteurs.

Le pont d’un navire arrivant à Ellis Island remplis d’émigrants. [Photo de presse / Agence Rol]. 1913. Disponible sur Gallica : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6928124n

Des départs bien organisés

Les Basques et les Béarnais partis les premiers fondent des colonies. Depuis ces colonies ils appellent leurs frères, cousins et amis à les rejoindre. Sachant qu’ils trouveront des membres de leur famille et d’autres francophones sur place, les départs sont de plus en plus faciles et de plus en plus massifs.

Plusieurs agences d’émigration voient le jour dans tout le département. Leur rôle est d’organiser les voyages. Ces agences travaillent en collaboration avec des compagnies maritimes et avec des sous-agents, présents dans presque tous les chefs-lieux de canton, qui prennent une commission sur chaque billet vendu. 

Parmi ces agents, certains ont produit de nombreux documents encore consultables aujourd’hui, témoignant des conditions de voyage de ces émigrés. On peut citer par exemple Guillaume Aphéça de Saint-Palais, Jean Baptiste Laplace de Navarrenx et Jean Vigné de Tardets. 

Répartition des agents et sous agents d’émigration dans le Sud Ouest vers 1890. Source : Institut culturel basque (https://www.eke.eus/fr)

Fin de l’émigration de masse et rupture avec la France

L’émigration vers l’Argentine se fait de plus en plus faible dès les années 1890 alors qu’à la même période l’émigration vers la Californie bat son plein.

La première Guerre Mondiale marque une première période de ralentissement de l’émigration. Elle marque également la rupture entre ceux restés en France et les émigrés qui refusent de combattre et préfèrent rester dans leur pays d’accueil. 

Par ailleurs, les demandes de naturalisation des français à l’étranger augmentent dès cette période.

La deuxième période est la crise économique mondiale des années 1929/1930.

En raison de cette crise, les institutions communautaires installées dans les pays d’accueil sont de plus en plus dépendantes financièrement vis-à-vis de la métropole et sont contraintes de fermer. Cela accentue la rupture avec la France.


Sources :

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